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By Radio Canada

En visite officielle au Canada, la ministre égyptienne de l’Immigration, Nabila Makram, a essuyé des critiques après avoir menacé, sur le ton de la blague, les opposants égyptiens à l’étranger de « décapitation ».

Dans une vidéo devenue virale mardi, Mme Makram apparaît en train de prononcer un discours, un micro à la main : On n’a qu’un seul pays, qui est l’Égypte. […] L’Égypte nous rapproche tous, peu importe où l’on est dans le monde. Ce pays est toujours dans notre cœur et on ne supporte pas qu’on dise du mal de l’Égypte à l’étranger.

Vous savez ce qui arrive à quiconque qui se trouve à l’étranger et qui dit du mal de notre pays? Il sera découpé, ajoute-t-elle en mimant une décapitation d’un geste de la main, suscitant le rire de la salle.

Mme Makram a fait cette déclaration dimanche à Toronto lors d’une rencontre avec des membres de la diaspora égyptienne, en présence de l’ambassadeur égyptien au Canada, Ahmad Abou Zeid, ainsi que du consul égyptien à Montréal, Hossam Moharram.

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C’est le journaliste canadien d’origine égyptienne Mohamad Nasr qui a diffusé en premier la vidéo sur son compte Twitter, tôt mardi matin. Le clip de moins de 30 secondes a été visionné plus de 68 000 fois en moins de sept heures.

Dans un entretien téléphonique, M. Nasr affirme avoir reçu la vidéo d’un ami qui était présent dans la salle de réception de l’hôtel Sheraton à Toronto, où Mme Makram a prononcé son allocution controversée.

La ministre s’est exprimée au Canada de la même manière qu’elle l’aurait fait en Égypte pour réprimer les libertés et faire taire les voix dissidentes.

Mohamad Nasr, journaliste canado-égyptien

Il affirme que la vidéo qu’il a partagée est devenue virale parce que les faits se sont déroulés au Canada. La ministre a peut-être oublié qu’elle se trouvait dans un pays qui respecte les droits de la personne, ajoute le journaliste, qui est suivi par plus de 22 000 internautes sur Twitter.

De son côté, la Coalition égyptienne canadienne pour la démocratie (CECD), qui a des bureaux à Ottawa, Montréal, Toronto et Vancouver, a elle aussi vivement dénoncé les propos de la ministre égyptienne.

« C’est très dangereux et inacceptable, a réagi Mohamed Kamel, membre du conseil d’administration du CECD, joint par téléphone. Ça nous rappelle l’affaire [du journaliste saoudien assassiné] Jamal Khashoggi. »

M. Kamel appelle le gouvernement canadien à condamner les propos de la ministre égyptienne de l’Immigration, affirmant que son organisme va déposer une plainte officielle au ministère canadien des Affaires étrangères, ainsi qu’à la police.

Si la ministre adresse ces menaces-là aux dissidents égyptiens au Canada, que fait donc le gouvernement égyptien des opposants dans le pays?

Mohamed Kamel, membre du conseil d’administration du CECD

M. Kamel dit prendre les mots de la ministre égyptienne au sérieux, même s’ils ont été prononcés sur le ton de la blague : Il ne s’agit pas ici d’une citoyenne régulière, il s’agit d’une ministre en visite officielle au Canada, dit-il. Son geste de la main imitant la décapitation a une signification très claire, ajoute-t-il. Le fait qu’elle l’ait fait avec le sourire est encore plus grave.

La ministre se défend

Dans une série de tweets diffusés sur le compte officiel du ministère égyptien de l’Immigration, Mme Makram justifie l’utilisation du verbe « découper » qu’elle a utilisé dans son discours, affirmant qu’il signifie « se mettre fortement en colère contre quelqu’un » dans la langue parlée en Égypte. Elle affirme que son geste imitant la décapitation « n’a rien de violent ».

Mme Makram se dit surprise de constater que « ses propos ont été dénaturés », assurant avoir employé des « paroles spontanées et simples ».

La ministre égyptienne a enfin accusé « certains partis », sans les nommer, de « mener une guerre féroce » contre son pays et de « chercher la division ».

« L’État protège ses citoyens et ne les menace pas », a-t-elle encore assuré.

Dans un rapport publié au début de juillet, l’organisation internationale pour la défense des droits de la personne, Amnistie internationale, accuse le gouvernement du président Abdel Fattah Al-Sissi d’avoir arrêté « des milliers de personnes de façon arbitraire, dont des centaines de dissidents », et « d’utiliser des tactiques répressives […] en soumettant les médias, les ONG, les syndicats et les militants à des restrictions étouffantes ».

Depuis 2014, plus de 1891 condamnations à mort ont été prononcées et au moins 174 personnes ont été exécutées, « souvent à l’issue d’un procès inéquitable », affirme encore l’ONG.

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